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Structuration du temps

Pour Eric Berne, chacun d’entre nous connait 3 soifs fondamentales : la soif de stimulation, la soif de reconnaissance, la soif de structure. La recherche de signes de reconnaissance va nous amener à structurer notre temps de veille pour être en lien avec d’autres personnes, dans le cadre de groupes sociaux. L’AT décrit 6 manières de structurer le temps que nous passons avec les autres : le retrait, les rituels, les passe-temps, l’activité, les jeux psychologiques et l’intimité. Ces 6 manières de structurer le temps ne sont pas complètement programmables. Lorsque nous allons déjeuner avec un collègue de travail, nous ne savons pas a priori ce que nous allons faire ensemble, réfléchir avec peu d’échanges, nous reposer, discuter de choses et d’autres, préparer notre réunion du lendemain, ou encore nous disputer à propos d’une affaire qui a posée problème, ou bien parler de nos difficultés dans le travail, de nos sources de joie avec une écoute et un échange réels.

Différentes formes de structuration du temps

Le concept de structuration du temps répond à plusieurs problématiques rencontrées en coaching : les insatisfactions d’un manager quant aux manières de gérer le temps dans l’équipe, la gestion personnelle du temps, l’organisation d’une réunion.

Retrait

Le retrait est une manière de structurer son temps en s’isolant mentalement ou physiquement des autres. Le retrait peut durer quelques secondes, lorsqu’au cours d’une séance de coaching, nous sommes pris par nos pensées ou bien plus longtemps, lorsque nous terminons la séance et que nous nous enfermons dans notre bureau pour nous recentrer. Les seuls échanges se limitent alors à notre dialogue intérieur. Nous sommes physiquement présents tout en étant sans échanges avec les autres. Le retrait présente de nombreux aspects utiles : réponse au désir ponctuel de se retrouver seul, concentration, préparation à une nouvelle tâche, prendre le temps de faire le point, permettre l’observation en dehors de l’engagement..
Nathalie a besoin de temps pour réfléchir, mûrir sa pensée, avant de pouvoir donner son avis. Dans une réunion elle est souvent en retrait, car elle a besoin de prendre du recul, de prendre le temps d’analyser ce qui a été dit et comment cela peut prendre sens dans son propre univers de pensée. Elle est souvent déstabilisée lorsque son N+1 l’interroge sur ce qu’elle pense de ce qui vient d’être dit. Accepter cette caractéristique et la reconnaître comme utile lui a permis de trouver des réponses utiles à ces demandes instantanées. Prendre conscience de son besoin de retrait l’a conduit à se préparer de petites zones de temps sans téléphone, ni dossiers, ni rendez-vous.

Rituels

Les rituels sont pour Eric Berne des « échanges hautement stylisés pouvant s’effectuer familièrement ou s’instituer en cérémonies qui deviennent alors totalement prévisibles. » Les rituels sont constitués de transactions codées, obéissant à des conventions sociales établies (rituels de salutation), ils sont programmés de l’extérieur par la tradition et l’usage social. Si les rituels communiquent peu d’information, ils procèdent du signe de reconnaissance mutuel. Lorsque nous disons : « Bonjour, comment allez-vous ? » à nos client, eux et nous savons bien que nous ne nous soucions pas réellement de leur santé. En revanche, ils se sentiraient blessés si nous les ignorions, et nous serions nous-mêmes frustrés s’ils ne nous saluaient pas en retour. Lors de plusieurs coachings il a été utile de rappeler au manager la nécessité d’accepter les rituels comme base de l’appartenance sociale. Les rituels sont indispensables pour permettre l’inclusion dans un groupe et éviter le rejet, ils n’engagent pas, mais constituent une ‘mise en bouche’ avant une structuration plus complexe du temps. L’absence de rituels (salutations) est très mal vécue dans les groupes.

Passe-temps

Les passe-temps : « Consistant à parler de manière acceptable de sujets admis, les passe-temps sont programmés socialement et comprennent des notes personnelles qui entraînent vers le jeu (Berne) ». Dans les passe-temps, les transactions sont complémentaires et peu impliquantes ; il n’y a pas d’écoute réelle. Les échanges sont  partiellement codifiés et portent sur des sujets d’ordre général, sans intention de faire changer la situation. Les interlocuteurs échangent diverses considérations d’usage sur des sujets passe-partout tels que le sport, les autos ou la meilleure manière de passer ses vacances. En absence de passe-temps, les signes de reconnaissance sont recherchés sous la forme de jeux psychologiques.
Lorsque André arrive dans son équipe, chaque lundi matin, la réunion démarre immédiatement, sans rituels ni passe-temps. André est vécu comme froid par son équipe et cela lui pèse. Il a une image de bosseur impénitent que rien ne peut atteindre. Ses collaborateurs lui reprochent l’absence de ‘Bonjour’. Lorsqu’il croise ses collaborateurs à la machine à café, il ressent de l’agacement et a des pensées du type, « je suis bien le seul à bosser dans cette boutique ».  La prise de conscience de la nécessité des rituels et des passe-temps pour l’équilibre du groupe va l’amener à modifier sa façon de voir et quelques comportements, il a par exemple créé une pause café préalable à la réunion du lundi pour permettre un peu de passe-temps, il a également pris conscience du besoin de signes de reconnaissance et il veille à en donner tout au long de la réunion.
Dans les organisations de nombreux passe-temps traitent des dysfonctionnements de l’entreprise : « le chef de service », « regarde ce qu’on nous fait faire », « moi si j’étais chef »… sont des passe-temps classiques. Nos clients pourront participer avec nous à ces passe-temps non constructifs, le coach pourra s’interroger sur sa propre attitude face à ces passe-temps et créer des passe-temps positifs.

Activité

Dans l’activité « les transactions sont programmées par les matériaux sur lesquels on travaille (Berne) ». Il s’agit d’une façon de structurer son temps par une série d’opérations orientées vers un but précis qui conduira à agir sur la réalité externe, la communication et l’énergie sont centrées sur les buts à atteindre. C’est la part la plus importante d’une séance de coaching.

Jeux psychologiques

Les jeux psychologiques : Les jeux psychologiques sont des séquences relationnelles qui vont conduire les différents protagonistes à ressentir un malaise qui est appelé bénéfice du jeu. Il s’agit d’une suite d’échanges (de transactions) avec un message caché qui va apparaitre sous la forme d’un coup de théâtre, laissant les différents protagonistes pantois, chacun confirmant alors des croyances négatives sur lui-même ou sur les autres. L’analyse des jeux constitue un aspect fondamental de l’Analyse Transactionnelle et mérite un développement spécifique. Il s’agit d’une forme de structuration du temps qui apporte de nombreuses stimulations, même si elles sont négatives. La supervision est le lieu d’analyse des jeux psychologiques que nous vivons avec nos clients.

Intimité

L’intimité est un « échange d’expression émotionnelle exempte de jeu et d’exploitation (Berne) ». C’est un mode de structuration du temps non prévisible, basé sur la confiance réciproque entre les partenaires. Tous les états du moi s’expriment, en particulier l’Enfant Libre, et les signes de reconnaissance qu’on y échange sont intenses, avec de nombreux signes de reconnaissance inconditionnels positifs. En analyse transactionnelle, la capacité à accéder à l’intimité constitue l’un des trois éléments de l’autonomie (conscience, spontanéité, intimité). L’intimité est imprévisible, le risque de la communication y est donc grand, en se dévoilant, on montre sa vulnérabilité qui pourrait être utilisée contre nous dans un autre cadre. L’intimité conduit à une écoute réelle, centrée sur l’autre, ses besoins, sa vision du monde, ses ressentis. Pour de nombreuses personnes l’intimité est difficile à atteindre, dans ce cas, passe-temps et jeux psychologiques vont se substituer à l’intimité.
Myriam est la Directrice export d’une entreprise de matériel électronique. Elle explique son agacement face aux réunions inorganisées, conduisant à des pertes de temps importantes. Ces réunions rassemblent des commerciaux et des agents de plusieurs pays européens, une à deux fois par semestres. Pendant une journée les différents thèmes d’actualité, les présentations de matériel se succèdent. Plusieurs concepts vont aider Myriam à modifier ses pratiques : en prenant conscience de la structuration du temps, elle identifie qu’une grande part de passe-temps et de jeux sont liés à l’absence de temps pour l’expression de chacun, de ses difficultés, à la difficulté de l’équipe à atteindre une forme d’intimité. Elle va ainsi instituer un temps de restitution qui va permettre à chacun de faire part de ce qui est important pour lui ce jour, ce qui l’a marqué dans le temps passé depuis la précédente réunion, ce temps va permettre après plusieurs séances une proximité plus grande entre les participants. Elle va également proposer un temps d’échange et de rencontres informelles avant la réunion, développer la participation et diminuer les présentations magistrales.
Le développement de l’intimité au sein d’un groupe professionnel est un thème abordé régulièrement en coaching, dès lors qu’il s’agit pour le manager d’améliorer la performance globale de l’équipe, de gérer des situations difficiles. De nombreuses situations sont propices au développement de l’intimité dans l’équipe : le départ de membres de l’équipe, les évènements de la vie de l’équipe : déménagement, nouvelle embauche, perte d’un contrat, fin d’un projet.
Michel prépare son départ de l’entreprise dont il a dirigé le département recherche et développement depuis 5 ans.  Il se demande comment bien terminer son parcours. Son coach lui propose de donner une occasion à son équipe de développer sa capacité à l’intimité. Pour cela, il prendra le temps d’une célébration qui donnera à chacun l’occasion de s’exprimer sur : sa première rencontre avec Michel, les difficultés rencontrées, la manière dont elles ont été surmontées, les joies, les meilleurs souvenirs. Pour sa part, Michel va donner un souvenir spécifique pour chacune des personnes et un signe de reconnaissance conditionnel. Il décide de le dire sous la forme « ce que j’emmène de toi c’est … ».