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Signes de reconnaissance

Lorsqu’un client arrive dans le bureau du coach, s’affale au fond du canapé et souffle « je n’en peux plus, je suis épuisé, je suis démotivé », il y a de grandes chances qu’il souffre d’un manque de réponse de son environnement à l’un de ses trois besoins fondamentaux : stimulation, reconnaissance et structure.

Adultes, nous sommes passés du besoin d’être touché physiquement du tout petit au besoin d’être reconnus, d’être touchés psychologiquement par nos interlocuteurs. Nous avons la capacité d’organiser notre environnement pour obtenir la satisfaction de ces besoins (réponse au besoin de structure et de signes de reconnaissance). Quand cela n’est pas possible, que notre environnement n’est pas favorable nous nous démotivons.

Pour répondre à ces trois besoins dans une séance de coaching, le coach va :

  • structurer de manière satisfaisante la séance pour permettre au client d’avoir suffisamment de repères,
  • donner des signes de reconnaissance directs au client,
  • le stimuler dans ses actions, ses prises de décisions, l’expression de sa vision du monde.
  • Les signes de reconnaissance

Tout comme notre client peut venir en séance démotivé, il peut agir sur la motivation et la santé au travail de ses collaborateurs en répondant de manière consciente à leur besoin de signes de reconnaissance.

  • Signes de reconnaissance

Le terme de signe de reconnaissance se réfère à toute action qui comporte la reconnaissance d’une personne, satisfaisant ainsi le besoin de reconnaissance : donner un signe de reconnaissance signifie reconnaître l’existence de l’autre,  lui accorder de l’attention. Sur le plan du contenu, les signes de reconnaissance sont des messages spécifiques destinés à souligner le caractère Ok ou Non Ok de l’autre personne.

Toute forme d’interaction du coach avec son client intègre des signes de reconnaissance. Une absence de regard, une expression coupée sont généralement interprétées par le client comme un signe de reconnaissance négatif : « tu ne m’intéresses pas ». L’écoute attentive d’un client, le désir vrai de le comprendre sont des signes de reconnaissance positifs importants.

Les signes de reconnaissance peuvent être verbaux ou non verbaux : physiques, ils impliquent un contact physique ; verbaux, ils se basent sur un message compréhensible par la personne. Ils peuvent aussi être transmis à travers le langage corporel (le froncement de sourcils du coach lorsque son client lui explique les bonnes idées qu’il vient de développer dans son travail conduit la personne à se sentir niée)…

Les signes de reconnaissance peuvent être positifs ou négatifs. Ils sont dits positifs lorsqu’ils procurent du plaisir et négatifs lorsqu’ils procurent du déplaisir. Mais au-delà, [1] c’est l’intention (qui n’est pas volontaire, mais qui apparait dans la transaction) qui peut être positive. Le signe de reconnaissance comporte alors un message « tu es Ok » (ou « c’est Ok ce que tu fais »), y compris lorsque le signe de reconnaissance comporte une critique constructive « tu es Ok, même si ce que tu as fait n’est pas Ok ».

L’intention négative d’un signe de reconnaissance se remarque lorsqu’il comporte un message « tu es non Ok », avec une confusion entre l’être et le faire. L’intention dépend de l’émetteur du message, nous avons à apprendre à donner des SDR avec une intention positive pour permettre le renforcement de la perception de sa valeur par la personne à qui nous parlons.

Lorsqu’un client ne reçoit pas assez de signes de reconnaissance positifs, il va chercher à en obtenir des négatifs. Si la gestion des signes de reconnaissance dans l’organisation ne permet pas d’obtenir des signes de reconnaissance pour la qualité du travail réalisé (« c’est bien le minimum de faire son travail, je ne vais quand même pas leur dire que c’est bien »), notre client commettra des erreurs pour obtenir au minimum des signes de reconnaissance négatifs. En coaching, il décrira les situations difficiles dans lesquelles il s’est mise, une exploration de sa gestion de signes de reconnaissance mettra sans doute en évidence, le manque d’échanges dans son milieu professionnel.

  • Conditionnels ou inconditionnels.

Les signes de reconnaissance conditionnels sont donnés pour un comportement (faire) ou pour quelque chose que la personne a ou dont elle dispose (avoir). Les signes de reconnaissance positifs conditionnels sont stimulants et valorisants et ont pour effet de renforcer la motivation de ceux qui les reçoivent. Les signes de reconnaissance conditionnels négatifs sont utiles, ils  permettent d’évaluer et de corriger les actes et les attitudes indésirables.

 Martine a découvert lors d’une séance de coaching l’importance des signes de reconnaissance pour la motivation (la sienne propre et celle de ses collaborateurs). Lors de  la séance de clôture elle donne de nombreux exemples de signes de reconnaissance qu’elle emploie désormais : féliciter un collaborateur pour la qualité du rapport qu’il m’a rendu la veille ; se féliciter elle-même au sujet de la manière dont elle a mené une négociation précise ; dire merci pour un document rendu à l’heure, pour une proposition d’idée ; dire à sa secrétaire combien elle apprécie son professionnalisme. Elle peut être également amenée à faire une remarque négative sur la conduite inappropriée de son assistant devant un client important (dans ce cas elle le fera en tête à tête) et inciter celui-ci à corriger son attitude. 

Les signes de reconnaissance sont inconditionnels quand ils concernent l’être de la personne ; positifs ou négatifs, ils s’adressent à la personne et procèdent d’une généralisation. Si Georges dit à une proche collaboratrice : « Françoise, vous ai-je dis que je suis très heureux de travailler avec vous ? », le compliment n’est pas lié à telle ou telle circonstance particulière et améliorera probablement la santé de son interlocutrice. Les signes de reconnaissance positifs inconditionnels renforcent la relation. Si en revanche, il lui dit : « Avec vous, de toute façon, il est impossible de discuter », c’est la personne elle-même qu’il disqualifie par ce jugement sans appel. L’effet en sera probablement désastreux sur le moral et la motivation de sa « victime ».

  • Gestion des signes de reconnaissance

Chaque personne a des niveaux différents de besoins en signes de reconnaissance, tout le monde doit en recevoir de la part des autres pour rester en bonne santé, mais avec des doses différentes quotidiennes. Claude Steiner[2] distingue 5 éléments participant de l’économie d’échange des signes de reconnaissance : demander, accepter, refuser, donner, s’en donner à soi même. Pour lui, les enfants sont élevés dans un système de gestion rigide des signes de reconnaissance répondant à 5 lois, que nous répétons à l’âge adulte, sans en avoir pleinement conscience :

  • ne donne pas les signes de reconnaissance que tu as envie de donner,
  • ne demande pas les signes de reconnaissance dont tu as besoin,
  • n’accepte pas les signes de reconnaissance que tu désires,
  • ne refuse pas les signes de reconnaissance dont tu ne veux pas,
  • ne te donne pas de signes de reconnaissance à toi-même.

Pour répondre à ces 5 lois chaque client dispose d’un arsenal de techniques personnelles. Le filtre à signes de reconnaissance, est destiné à éviter de modifier son cadre de référence : tout signe de reconnaissance qui ne correspond pas à ses croyances sur lui-même sera filtré. « Il dit ça non parce qu’il le pense, mais pour me faire plaisir ». La dévalorisation du SDR reçu permet également de ne pas l’accepter : « il était vraiment bien ton rapport – c’est vraiment le minimum pour un bon client ».

Notre client peut aussi disposer de stratégies pour donner des signes de reconnaissance contrefaits : « tu as l’air d’avoir atteint tes objectifs, plus ou moins. » Comme si le SDR était donné puis repris.

Claude Steiner estime que les parents transforment une situation dans laquelle les signes de reconnaissance sont illimités (la vie) en une situation ou les signes de reconnaissance sont en nombre limités et où le prix à payer pour les obtenir est élevé. Cette situation est observable dans les entreprises, le contrôle des signes de reconnaissance permet de développer l’adaptation des personnels. Améliorer la gestion des signes de reconnaissance conduit au développement de l’autonomie des personnes. Tout manager pourra être amené à se poser la question de ses manières de gérer les signes de reconnaissance pour améliorer le climat dans son équipe.

  • Conditions de l’efficacité des signes de reconnaissance

Pour être efficaces, les signes de reconnaissance doivent être proportionnés et  sincères. Un compliment adressé mécaniquement tous les matins à une personne produira à la longue davantage d’irritation que de plaisir. Claude Steiner distingue 4 critères : sincérité et congruence (je crois vraiment à ce que je donne comme signe de reconnaissance), juste proportion, gratuité en terme d’échange (je ne donne pas un signe de reconnaissance en attendant d’en obtenir un en retour, ou en ayant quelque chose à demander à quelqu’un), responsabilité du SDR (je m’implique dans ce que je dis).

Souvent on ne reçoit pas les signes de reconnaissance dont on a envie ou besoin : telle directrice adjointe va être reconnue pour sa beauté, sa gentillesse, alors qu’elle voudrait qu’on reconnaisse sa manière de traiter les difficultés de son poste. Tel homme va être reconnu pour sa réussite professionnelle, alors qu’il aurait besoin de signes de reconnaissance sur sa manière de concilier sa vie personnelle et professionnelle. Pour un coach identifier les caractéristiques cachées de son client lui permettra de donner des signes de reconnaissance efficaces pour améliorer l’estime de soi de son client.

  • Quand penser « signes de reconnaissance » en coaching ?

J’ai l’habitude de dire que deux signes de reconnaissance spécifiques, verbaux, devraient être émis par le coach pendant chaque heure de coaching. Si le coach a l’intention d’aider son client à développer une estime de soi basée sur une vision réaliste et positive de lui-même, il est important qu’il lui donne des signes de reconnaissance positifs conditionnels. Pour moi, la qualité d’un coach, au-delà de sa capacité à poser les questions les plus adaptées au problème repose sur la qualité de la relation qu’il crée. Les signes de reconnaissance en sont un élément premier. L’apprentissage consiste à détecter chez le client ce qu’il fait de bien, qui est plutôt nouveau ou important pour lui.

  • Je suis vraiment impressionné par la capacité que vous avez à mettre en action les décisions que vous prenez en séance.
  • Vous avez une belle capacité à penser clairement les situations que vous présentez.
  • J’apprécie la manière dont vous montrez votre souci éthique dans la relation à vos collaborateurs.

Dans les situations suivantes, la gestion des signes de reconnaissance est une piste stratégique intéressante pour le coach :

  • le client raconte des difficultés relationnelles avec son N+1 ou ses collaborateurs, il peut y avoir manque de signes de reconnaissance ou overdose de signes de reconnaissance négatifs. Souvent un client peut attendre des signes de reconnaissance d’une personne importante pour lui et ne pas les obtenir, il devra apprendre à les demander ou apprendre à s’en passer ou encore rechercher d’autres sources.
  • lorsque des jeux psychologiques sont joués dans l’équipe, il y a manque de signes de reconnaissance conditionnels positifs.
  • lorsque notre client nous dit combien il est démotivé, combien son équipe est démotivée, il y a manque de signes de reconnaissance positifs conditionnels et inconditionnels.

[1] Carlo Moiso, Michele Novellino – Retour aux sources – Les Editions d’Analyse Transactionnelle, Lyon, 2004

[2] Claude Steiner – Des scénarios et des hommes – Desclée de Brouwer, 199