Professionnel ou amateur ? Article de 2006
Je me défini à la fois comme un professionnel et comme un amateur du coaching !
Professionnel dans le sens où je suis formé à la relation d’accompagnement, je connais l’entreprise, j’ai suivi un chemin de développement professionnel et personnel, je connais et j’utilise plusieurs cadres de références permettant l’analyse des situations vécues par les hommes dans le cadre du travail… et amateur dans le sens où j’aime cette activité, qu’elle ne me permet pas seule de vivre, que je n’en ai pas encore fait le tour, qu’elle continue à me surprendre, que je n’en ai pas compris toutes les subtilités. Amateur encore dans le sens que je ‘pratique’, comme un joueur amateur de violon, mes gammes se sont les lectures, les analyses de situations, l’écriture, la préparation de formations.
Pour atteindre ce degré de performance, le coach aura besoin, outre de ses compétences relationnelles, d’écoute et d’acceptation de l’autre, de 6 compétences spécifiques :
La relation du professionnel à son cadre de référence
Un article d’un analyste transactionnel allemand vient poser le problème de la relation du professionnel à son cadre de référence, dans une visée constructiviste.Une des différences entre un professionnel et un non professionnel est peut-être que le premier connaît mieux la teneur de ses réponses intuitives, la manière toute personnelle dont il a tendance à y réagir et la façon dont il peut les traduire en mots. Un professionnel peut nommer des réalités qui vont être créées au lieu de simplement agir ou réagir en fonction d’elles. Pour interpréter ce qui se passe le clinicien ne dispose pas seulement d’idées personnelles, mais aussi d’un cadre professionnel de références qu’il peut relier à elles. » Bernd Schmit – Intuition du possible et construction transactionnelle de la réalité – Actualités en Analyse Transactionnelle. AAT 24 – 93 – 2000Le professionnel est celui qui connaît la teneur de ses réponses intuitives, il est capable d’observer ses propres comportements, de se positionner en méta pour analyser ce qu’il perçoit de la situation, éventuellement de percevoir l’origine de ses pensées en fonction de ce à quoi il croit, de les relier à ses valeurs, à son histoire, à son cadre de référence, à ses orientations politiques. Il pourra, avec l’habitude, penser ce qui se passe dans la situation et décider d’actions adaptées (créer le futur le plus efficace en fonction de la demande du client).
- Face à une cliente, qui décrit une situation de harcèlement, le coach professionnel pourra ressentir sa propre colère, en prendre conscience, se demander ce qu’il aurait spontanément envie de faire, vérifier que c’est l’attitude la plus aidante pour sa cliente et décider comment agir, il pourra imaginer les conséquences de ses comportements et de ses paroles et construire un futur plus riche, plus éthique, plus confortable pour sa cliente.
- Face à un client, qui décrit la perte d’estime liée au changement de poste imposé par sa nouvelle hiérarchie, il pourra se rendre compte qu’il ne ressent pas d’émotion, qu’il aurait plutôt envie de ne pas écouter le discours de ce client. Il pourra se demander quel est l’élément qui génère cet inconfort : sa propre histoire (est-ce que ça a à voir avec les soucis de boulot de mon père quand j’étais adolescent), la manière du client de présenter son histoire (voix plaintive, accusations…) et à partir de là trouver une option d’intervention.
Compétences du coach
- Observation: la capacité à observer le non verbal du client : ton de voix, posture, attitudes. (Comme disait Eric Berne : chaque muscle du client peut donner des indications complémentaires au discours).
- Discrimination : la capacité à identifier ce qui est signifiant dans ce que son client lui relate,
- Décentration: la capacité à penser et à comprendre la situation à travers les yeux et le cadre de référence de son client, à ne pas juger en fonction de ce qu’il aurait fait dans la même situation,
- Perception: la capacité à percevoir ce qui lui appartient dans le flux de pensées et d’émotions qui le traverse,
- Analyse: la capacité à définir le dysfonctionnement en fonction d’un des modèles de la psychée humaine, de l’organisation. La capacité à identifier la compétence non mise en œuvre, attendue pour permettre la résolution de la difficulté, la capacité à identifier la part de son client dans la situation. La capacité à percevoir les potentiels et zones d’excellence de son client, les compétences acquises sur lesquelles s’appuyer.
- Formulation: la capacité à adapter son discours à l’étape de développement de son client.
Prendre son temps
Un deuxième aspect de l’interpellation de Bernd Schmit nous invite à ne pas aller plus vite que le client, à identifier la réalité qui va être créée à partir des interventions du coach :- Certaines interventions pourront conduire le client à prendre des risques (développer son agressivité, faire part de son mécontentement de manière non adéquate), par exemple si le coach amène le client à se concentrer sur la nécessité d’un engagement du patron…
- Certaines interventions maintiendront le client dans une sorte de sauvetage permanent de la structure, par exemple si à l’issue de la séance, le client repart avec l’idée de faire plus de la même chose, encore plus de fiches, de réponse aux attentes de l’auditeur…
- Certaines interventions permettront au client de se concentrer sur son propre rôle et ajuster ses comportements dans les limites de sa mission. (Dans le cas présent en faisant la liste des actions qui sont dans sa propre fiche de mission et en les réalisant de manière juste et professionnelle).
- Certaines interventions permettront au client de prendre conscience de sa propre part dans le processus mis en œuvre : par exemple s’il perçoit qu’en réalisant de nombreuses actions, en faisant à la place de, il aide le système organisationnel à ne pas changer.
Georges est responsable de la qualité et de la sécurité dans son entreprise de transport, son patron n’est pas convaincu de l’utilité de cette démarche, elle est « coûteuse en temps pour les différents professionnels, obligatoire, n’apporte pas de résultats mesurables rapidement ». Georges se demande comment faire comprendre à son patron l’importance de cette action. Il se sent non reconnu, il compense autant que faire se peut l’absence de décisions, il comble les manques, rédige les documents nécessaires, informe, demande des décisions, mène les actions prévues à la place des responsables. Lors d’un audit externe, l’auditeur découvre que plusieurs des procédures prévues ne sont pas respectées par les responsables de service. Georges vit les non-conformités comme une atteinte personnelle. Il n’en dort plus, il a envie de donner sa démission, mais ne sait pas ou aller travailler, ni comment se sortir de la situation.Cette situation est fréquente pour les animateurs des activités transversales : qualité, contrôle de gestion, environnement… Comment accompagner le professionnel dans l’analyse de la situation et sa résolution ?